N-AES
Et voilà, ça devait arriver : on a un nouveau système d'exploitation
pour nos belles machines ! Il est en directe provenance d'Allemagne, et a
été conçu par Woller et Linker.
Enfin, à proprement parler, ce n'est pas un nouveau système complet,
puisqu'il s'agit en fait d'un AES de remplacement pour MiNT (MiNT Is Now
TOS), le "TOS multitâche à la sauce Unix" qui continue à être développé par
Eric SMITH, un ancien de la Corp. Pour résumer, l'AES est la partie du TOS
qui s'occupe de gérer l'ensemble des évènements qui arrivent sur votre
système, comme par exemple l'affichage des barres des menus déroulants, des
fenêtres, du défilement de leurs ascenseurs...
Le pack N-AES étant en fait composé de N-AES proprement dit, d'une
version spécifique de MiNT (que chacun est d'ailleurs libre de remplacer par
une autre version), de Thing, plus quelques utilitaires annexes, chacun de
ces éléments apportant son lot de nouveauté à l'utilisation de nos machines.
Même si cet article ne porte à la base que sur N-AES, j'ai choisi
d'évoquer les fonctionnalités de l'ensemble du pack, plutôt que de me
concentrer sur celles de N-AES proprement dit. Par souci de clarté, je
tâcherais cependant de faire la différence entre les fonctionnalités de
MiNT, de N-AES, et de Thing.
Peut-être trouvez-vous que ça fait beaucoup de logiciels d'un coup ?
Effectivement, ce n'est pas pour rien si N-AES est livré sur 4 disquettes
(DD, soit, mais quand même !).
Et peut-être éprouvez-vous quelque crainte à l'idée de l'installation d'un
bureau alternatif (Thing), de MiNT (réputé complexe), sans parler de ce
nouvel AES... Eh bien détrompez-vous, l'installation s'effectue très
simplement en suivant les instructions de la doc (pourtant succincte !)
fournie par la Terre du Milieu avec N-AES, qui vous indique où copier les
fichiers du pack, ainsi que d'éventuelles modifications à apporter au
fichier de configuration de N-AES, si certains paramètres par défaut ne vous
convenaient pas.
Après avoir suivi ces instructions, on retient sa respiration, on appuie sur
, et on attend, inquiet, l'oeil fixé sur l'écran. Et tout se passe
très bien, si ce n'est une grosse surprise : le pack que m'a envoyé TdM pour
le test est... en allemand. Coup de bol : j'ai encore quelques notions
d'allemand en tête, et j'avais déjà presque fini de traduire le fichier RSC
de Thing 1.20. Et comme la majeure partie des dialogues entre l'utilisateur
et la machine dépendent non pas de l'AES, mais du bureau, eh bien j'ai pu
m'en sortir sans problème. Ouf ! :-)
La chose qui saute aux yeux, à la première ouverture de fenêtre, c'est
que la barre de la fenêtre a changé : d'une part le nom de l'application
propriétaire de la fenêtre est affiché à gauche, près du Closer (eh oui,
sinon il devient impossible de savoir de quel programme dépend une fenêtre
!), et d'autre part deux nouveaux gadgets y sont présents à côté du Fuller :
le premier était déjà présent dans la lentissime AES de MultiTOS (fourni
avec la machine), quant au second, il est présent dans... Win95 ! Eh oui,
c'est le gadget "Souligné", qui permet dans Win95 d'icônifier une fenêtre et
qui, dans N-AES, permettra de cacher l'ensemble des fenêtres d'une applica-
tion, c'est à dire de les faire disparaître, tout en les gardant virtuelle-
ment ouverte. Ceux qui ont l'habitude d'utiliser un ordinateur en
environnement multitâche savent à quel point l'écran devient vite chaotique,
chaque programme en mémoire apportant son lot de nouvelles fenêtres. Eh bien
grâce à ce nouveau gadget, vous n'aurez plus jamais besoin de fermer toutes
les fenêtres de l'écran pour aller trouver une icône qui se trouve derrière
: vous cachez toutes les fenêtres de l'application en cours, et voilà ! Et
si vous ne voulez agir que sur une fenêtre en particulier, il vous suffit de
l'icônifier ! Ces fonctionnalités sont un apport de N-AES
Une autre particularité, à propos des fenêtres : toutes les actions
qui leur sont appliquées se font en temps réel, c'est-à-dire que quand vous
déplacez la fenêtre, ou que vous la redimensionnez, ce n'est plus son
"fantôme" qui se déplace, mais bel et bien la fenêtre. Vous me direz "A quoi
ça sert ?". Effectivement, dans ce cas précis, ce n'est généralement pas
très utile, mais là où ça devient intéressant, c'est quand le déplacement du
contenu de la fenêtre avec les ascenseurs se fait également en temps réel :
plus question de procéder par essais/erreurs pour retrouver un endroit
précis dans une grande fenêtre... Et pour ceux que ça ennuierait, les
déplacements temps-réel, la touche Control permet de les annuler. Là encore,
ces fonctionnalités sont apportées par N-AES.
Du côté des apports de MiNT, maintenant, on trouve bien entendu la
possibilité de lancer plusieurs programmes, et de les voir tous tourner en
même temps... C'est extrêmement utile quand on effectue une tâche qui
nécessite l'utilisation de deux (ou plus !) programmes distincts, comme par
exemple la conception de pages Web (navigateur web + éditeur de texte), ou
la frappe d'un texte avec inclusion d'un graphique fait avec un logiciel
distinct (traitement de texte + tableur). Mais ces exemples sont loin d'être
exhaustifs, et quand on commence à avoir l'habitude d'utiliser un
environnement multitâche, on y prend goût très rapidement : plus besoin de
quitter un premier logiciel pour revenir au bureau en lancer un second pour
faire ce qu'on a besoin, avant de quitter le second logiciel, pour revenir
au bureau charger le premier programme, recharger le fichier sur lequel on
travaillait, etc... Bref, le multitâche, c'est bien ! Mais le problème, me
direz-vous, c'est que la puissance de nos machines est limitée, et que
l'ensemble des programmes en mémoire doivent se partager cette puissance. Et
il est vrai que sous MultiTOS, l'AES multitâche d'Atari drainait déjà une
bonne partie du temps-machine. N-AES semble, lui, avoir été relativement
optimisé à ce niveau, dans la mesure où, si un léger ralentissement est
sensible par rapport au TOS monotâche, celui-ci est -au moins à mes yeux-
négligeable par rapport au confort qu'apporte l'utilisation d'une machine
multitâche. Un fichier compilé pour 68030 est d'ailleurs fourni, pour
utiliser notre processeur préféré au mieux de ses possibilités.
Voici les résultats de GEMBench avec N-AES, sans accélération VDI, ni carte
accélératrice en 640x480x16 couleurs, avec la démo de Papyrus 5, la démo de
CAB 2, et QED 4.1 en mémoire, les pourcentages étant exprimés par rapport à
un Falcon de base, sans rien en mémoire :
GEM Dialog Box: 4.215 109%
VDI Text: 4.920 97%
VDI Text Effects: 10.440 98%
VDI Small Text: 4.750 96%
VDI Graphics: 11.825 97%
GEM Window: 3.160 69%
Integer Division: 3.225 96%
Float Math: 0.380 97%
RAM Access: 2.585 98%
ROM Access: 2.580 83%
Blitting: 3.795 96%
VDI Scroll: 6.605 102%
Justified Text: 5.600 96%
VDI Enquire: 2.065 84%
New Dialogs: 5.805 100%
============================================
Graphics: 94%
CPU: 93%
Average: 94%
Comme vous pouvez le constater, le ralentissement, bien que sensible,
n'a rien d'effrayant, si on prend en compte les possibilités offertes par le
fait de pouvoir utiliser tous ces programmes presque en même temps.
Autre détail sympathique, il est maintenant possible de charger un
ACCessoire à la volée, en l'ouvrant comme un programme normal. Et quand vous
n'en avez plus besoin, vous pouvez également le supprimer de la mémoire en
cliquant sur cet accessoire en gardant la touche Control enfoncée. La même
méthode est également valable pour quitter un programme, d'ailleurs.
Thing est également une source importante de nouveautés par rapport au
bureau du TOS : un grand nombre de possibilités intéressantes apparaissent,
comme par exemple la possibilité de fermer toutes les fenêtres du bureau en
une seule manoeuvre, la création de groupes de fichiers (permet de se faire
des groupes d'applications, par exemple), la présence d'une barre de menu
Outils modifiable à volonté, le look 3D, l'émulation du double-clic gauche
par un simple clic droit (tout bête, mais génial !), la possibilité de
mettre une image en fond d'écran, la possibilité de sélectionner un fichier
dans une fenètre en arrière-plan, l'autolocator avec complètement automati-
que des noms de fichier (ceci permet de taper au clavier le nom d'un
fichier, les fichiers correspondants au nom tapé étant sélectionnés auto-
matiquement), le placement intelligent de la fenêtre (possibilité de pro-
téger les zones du bureau où sont placées des icônes, afin qu'elles soient
toujours accessibles), le dimensionnement automatique des fenêtres (afin que
leur taille soit adaptée à leur contenu). Il est également possible
d'utiliser directement des programmes externes pour effectuer les opérations
disques telles que la copie, le formattage, l'effacement, la recherche de
fichiers (particulièrement intéressant quand on possède Kobold !). Et, en
parlant de fichiers, vous pourrez gérer tous les attributs des fichiers de
vos partitions Minix directement (permissions en lecture/écriture/exécution,
noms longs, etc...). Il devient également possible de voir les programmes
TOS se lancer dans des fenêtres, ce qui est quand même plus pratique que de
les voir envahir tout l'écran, et qui permet également de lire ce qu'affiche
un programme avant de revenir au bureau (qui n'a jamais pesté contre un TTP
qui revenait tellement vite au bureau qu'on n'avait pas le temps de lire sa
liste de commandes ?).
Peut-être vous disez-vous que l'accès à ces paramètres manque un peu
d'originalité, et que c'est du déjà vu ? Eh bien heureusement, N-AES possède
quelques paramètres assez hors du commun par rapport à l'habitude : on peut
modifier l'aspect du bureau, au niveau du contenu des fenêtres (effacer le
Fuller, et accéder à sa fonction par un double-clic sur la barre de la
fenêtre), ou encore au niveau de la gestion des menus, puisqu'on peut
modifier sa couleur de fond (Gadget ? Oui !), le paramétrer en "Pull-Down",
c'est-à-dire qu'à l'instar du Mac, il faut cliquer sur la barre de menu pour
qu'elle se déplie (personnellement, je trouve ça pénible), ou encore la
cacher afin de gagner un peu de place (elle apparait alors uniquement quand
la souris touche le bord supérieur de l'écran. J'ai trouvé cette dernière
possibilité très intéressante : nos machines ayant bien du mal à monter à
des résolutions intéressantes, tous les moyens sont bons pour gagner un peu
d'espace de travail !
Un certain nombre d'utilitaires annexes sont fournis avec N-AES, comme
N-Closure, qui permet d'effectuer un "Shutdown" propre et net, c'est-à-dire
d'éteindre la machine en évitant toute perte de données. MultiStrip est une
barre de tâches qu'on pourra assimiler à celle de Win95. Personnellement, je
ne trouve pas ça très utile, dans la mesure où ça prend beaucoup de place
pour rien, puisque la même fonction est très bien assumée par le premier
menu du bureau, où s'affichent accessoires et programmes en cours
d'exécution. Ceci dit, elle a également d'autres fonctions qui peuvent la
rendre utile, comme l'accès direct à ses groupes de fichiers, l'affichage de
l'heure et de la RAM (ST et Fast) libre, la possibilité d'éjecter un medium
SCSI (ZIP, JAZ, etc...) en cas de ShutDown, etc...
N-ChangeRes permet théoriquement de changer de mode vidéo. Si je dis
"théoriquement", c'est juste parce que ça ne fonctionne pas correctement
chez moi. Je pense que le problème est bénin, dans la mesure où le programme
crashe après m'avoir informé qu'il n'a pas trouvé son fichier de
configuration, mais il n'empêche, ça ne marche pas !
Sur le plan de la fiabilité, mes tests ont été assez concluants, dans
la mesure où je n'ai pas rencontré de problème majeur pendant l'utilisation.
Un seul des programmes que j'ai essayé semble poser des problèmes : 1st Word
Plus. Celui-ci semble en effet avoir du mal à comprendre qu'il est en
environnement multitâche, et tant qu'il est lancé, inutile d'espérer pouvoir
lancer un autre programme. Il semble également incapable de se servir du
sélecteur de fichiers fourni avec N-AES. Celui-ci a la particularité d'être
non-modal, ce qui veut dire qu'il ne bloque pas la machine pendant qu'il
reste ouvert : vous pouvez tout-à-fait continuer à travailler en laissant de
côté le sélecteur ouvert. Il est même possible d'avoir plusieurs sélecteurs
ouverts en même temps ! Mais ce n'est pas du goût de 1st Word, qui plante
net... Mais c'est le seul, à ne pas savoir apprécier les qualités de ce
sélecteur de fichier par ailleurs fort pratique.
Bon, allez, finies les fleurs : si on passait à ce qui ne va pas ? Bon,
il faut avouer, ça ne vas pas être très long, mais on ne va quand même pas
en dire que du bien, ça ne serait pas sérieux, N-AES n'est quand même pas
parfait. Par exemple, il est fréquent qu'on utilise des programmes
résidents, pour ajouter telle ou telle fonctionnalité à celle de son
environnement. L'exemple type, en environnement multitâche : OLGA, ce petit
logiciel qui permet de synchroniser deux programmes agissant sur le même
fichier, afin qu'une modification effectuée dans l'un des deux programmes
soit répercutée automatiquement dans le second. OLGA est un programme avec
lequel l'utilisateur n'a JAMAIS d'interaction. Il réside juste en mémoire.
Or, il apparait dans la barre de tâche, ce qui ne sert strictement à rien,
dans la mesure où un clic sur OLGA dans cette barre de tâche revient à le
faire passer en avant-plan, ce qui est ridicule, dans la mesure où OLGA ne
possède même pas d'interface à faire passer en avant-plan. On s'aperçoit
particulièrement bien du ridicule de la situation quand on utilise la
combinaison de touches Control+Alt+Tab pour faire défiler les tâches : il
est fort possible, en imaginant que vous soyez en train d'utiliser QED pour
éditer un fichier, que vous vous retrouviez à faire défiler 5 -voire même
plus- tâches : QED, Thing, MultiStrip (la barre de tâches "à la Win95"),
OLGA, et SpeedUp (partageur de temps machine en fonction des priorités
attribuées aux différentes tâches). Regrettable manque, qui contraste avec
la richesse des possibilités de configuration d'N-AES. Une petite suggestion
à faire aux auteurs, donc : donner la possibilité de lancer un programme
automatiquement au début de chaque session sans nécessairement l'afficher
dans la barre de tâches.
Un autre point noir : la configuration du système passe par l'édition
manuelle de plusieurs fichiers de configuration. Il aurait sans doute été
plus agréable de faire les paramétrages par le biais d'une interface
graphique, et ça aurait permis d'éviter la validation d'options
incompatibles, comme HideMenu et PullDown, ce qui aboutit à des situations
ubuesques. En l'occurence, la barre de menus devient totalement inaccessible
!
Comme conclusion générale, je dirais que N-AES est sans aucun doute la
solution la plus confortable que j'aie vu pour exploiter au mieux les
possibilités de son Falcon : avec un taux de compatibilité extrêmement
élevé, par rapport aux nombreuses innovations intéressantes du système, une
bonne stabilité, et une vitesse somme toute très honorable, N-AES présente
un ensemble d'avantages non négligeables, qui ne manqueront pas
d'interpeller ceux d'entre vous qui cherchent à avoir un environnement de
travail puissant, fiable et -ce qui n'est pas négligeable- confortable. Son
prix, de 33% inférieur à celui de MagiC! aura également son importance dans
le choix qu'effectueront ceux-là en achetant l'un ou l'autre.
Tan Noz